La Neuro-éducation, pour enseigner efficacement

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On entend beaucoup parler des neurosciences dans le champs de l’éducation depuis quelques années. Une nouvelle approche pédagogique a même émergé à la suite des découvertes scientifiques récentes sur le cerveau : la neuro-éducation. De quoi s’agit-il et comment l’utiliser dans nos pratiques pédagogiques ?

Premier pilier de la neuro-éducation : l’attention

On ne peut rien apprendre si on n’est pas attentif. C’est un constat banal mais nous autres profs savons combien il est difficile de maintenir l’attention des élèves. Peut-être connaissez-vous le célèbre test de l’attention sélective, avec des ballons et un gorille, imaginé par Daniel J. Simons ? Ce test montre que notre attention n’est pas aussi performante qu’on l’imagine (et celle des élèves non plus !).

La lumière naturelle a également un impact important sur l’attention des élèves, qui sont donc plus réceptifs lorsque la classe est éclairée naturellement plutôt que par des ampoules électriques. L’hiver européen et ses journées raccourcies et sombres n’est donc pas idéal pour apprendre…

Second pilier de la neuro-éducation : la mise en activité

Un cerveau passif n’apprend pas. La pédagogie active, fondée sur l’expérimentation et la recherche, se trouve donc au cœur de la neuro-éducation. Les inspecteurs et les formateurs insistent depuis bien des années déjà sur l’importance de rendre les élèves actifs dans leurs apprentissages, et fustigent le cours magistral.

Le Centre de Recherches Interdisciplinaires (CRI) propose une multitude d’innovations pédagogiques sous forme de fiches, d’un MOOC, de retours d’expérience, de colloques, pour aider les enseignants à mettre en place une pédagogie active, propice aux apprentissages. Vous pouvez avoir un aperçu du large spectre des pédagogies actives dans cet article : https://www.innovation-pedagogique.fr/article1812.html

Troisième pilier : l’importance de l’erreur

Les recherches en neurosciences ont mis en évidence que c’est en se corrigeant que le cerveau apprend. Il est donc absolument nécessaire de faire des erreurs, de les reconnaitre, puis de les corriger, si l’on veut apprendre quelque chose. Pour le dire autrement, le processus de l’essai-erreur-correction est le plus efficace. Les exercices divers et variés sont donc de bons supports pédagogiques d’après la neuro-éducation, à condition que les élèves puissent connaitre leurs erreurs et le moyen de les corriger.

Le statut positif de l’erreur est ainsi fondamental pour que les élèves puissent progresser. Mais il importe qu’ils puissent repérer d’où provient leur erreur pour pouvoir la corriger. Il faut donc les aider à identifier la source de leur erreur : défaut de raisonnement ? Manque de connaissances ? Inattention ?

Quatrième pilier de la neuro-éducation : l’importance du feed-back

Identifier les erreurs et les corriger, c’est bien, mais les élèves ont aussi besoin d’un feed-back rapide pour assimiler ce qu’on leur enseigne. Rendre des copies trois semaines après l’exercice n’a donc qu’un impact très limité, voire inexistant. L’activité de restitution des savoirs permet de mieux retenir ces derniers, mais pour que cela soit efficace, le timing doit être serré. Les chercheurs ont mis en évidence le fait que, dans l’idéal, il faudrait consacrer 15 minutes à un apprentissage, puis faire 15 minutes de test en suivant, et ainsi de suite jusqu’à ce que le test soit intégralement réussi. Cette méthode d’assimilation est celle qui a donné les meilleurs résultats chez les universitaires qui se sont penchés sur la neuro-éducation.

En effet, quand on étudie un objet d’apprentissage, on a l’impression de savoir, et ce n’est qu’en passant à la phase de test qu’on se rend compte qu’on ne sait pas.

L’intelligence, c’est résister à ses propres automatismes

Voici un petit problème à résoudre : Robin a 25 gommes. Il a 20 gommes de moins que Léa. Combien de gommes a Léa ?

La réponse instinctive est : 5. Mais la bonne réponse est… 45 ! En effet, l’automatisme nous conduit à faire une soustraction 25 – 20 parce que nous retenons principalement « gommes de moins » dans l’énoncé.

Si nous sommes capables de répondre « 45 », c’est grâce à notre cortex pré-frontal, qui sert à inhiber les autres aires du cerveau, plus automatisées. Or le cortex pré-frontal arrive à totale maturation entre 20 et 25 ans, au début de l’âge adulte… Nos élèves ne sont donc pas bien équipés pour procéder à cette inhibition, pourtant essentielle dans les apprentissages scolaires.

Cela explique pourquoi les élèves les plus agités, les plus « instinctifs », ceux qui ne parviennent pas à se maitriser, sont aussi ceux qui ne parviennent pas à être attentifs et performants. Il est par conséquent fondamental pour nos élèves de savoir gérer leurs émotions et d’apprendre à se contrôler, afin d’être en mesure d’apprendre.

Apprendre, c’est aussi inhiber l’égocentrisme et s’adapter socialement

Les recherches en neuro-éducation révèlent aussi que pour apprendre, il est nécessaire d’inhiber notre façon de voir les choses, de prendre en compte le point de vue de l’Autre et de faire une synthèse. En effet, si un élève n’est pas capable d’accepter un point de vue divergent (celui du prof) de ce qu’il pense être correct, il ne peut pas progresser. Cette compétence essentielle est très liée à l’adaptation sociale.

Ainsi, un élève qui a de bonnes fonctions exécutives peut mieux contrôler ses impulsions, mieux résister à ses pulsions égocentriques, et dès lors se montrer plus performant. L’apprentissage scolaire est donc fortement dépendant de la maturité émotionnelle.

De plus, le rôle fondamental du sommeil a également été mis en évidence par les chercheurs en neuro-éducation. Celui-ci joue un rôle majeur dans la consolidation des apprentissages, mais aussi dans le contrôle émotionnel et dans les capacités d’attention. C’est le rôle du sommeil qui a d’ailleurs présidé à la mise en place de la pédagogie spiralaire (cf réforme du collège de 2016) : l’apprentissage fragmenté se révèle plus performant, d’après les chercheurs en neuro-éducation, que l’apprentissage condensé. Le même apprentissage fragmenté sur une semaine, avec assimilation pendant le sommeil de manière répétée, est ainsi bien plus efficace et efficient que le même apprentissage dispensé sur une journée (avec une seule nuit de sommeil pour assimiler).

Quelle est la clef du succès d’un système scolaire ?

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la neuro-éducation ne fait pas l’apologie des nouvelles technologies pour mieux apprendre. D’ailleurs, les systèmes scolaires les plus performants (en Asie, en Scandinavie) utilisent très peu l’ordinateur en classe. Singapour, qui arrive en tête des enquêtes PISA, a mis en place un système scolaire fondé sur le travail, l’effort et la discipline, où la technologie conserve une place très modérée. Mais il faut aussi signaler que 20 %du budget de l’Etat de Singapour est consacré au système éducatif (et à la formation des enseignants), contre 6,6 % pour la France en 2019. En outre, le recours massif aux cours de soutien, le soir après l’école, explique aussi le succès de Singapour : 80 % des élèves du primaire et 60 % des élèves du secondaire sont inscrits dans ces cours de soutien.

En Finlande, pays qui a longtemps caracolé en tête des systèmes scolaires les plus performants, les pédagogies actives et la coopération (les tables sont en îlots) sont la règle. Les activités manuelles occupent également une place importante dans les apprentissages car les chercheurs ont pu démontrer qu’un apprentissage laisse plus de traces dans la mémoire quand il est associé à une activité manuelle ou sensorielle.

Les enseignants finlandais insistent sur les capacités d’empathie, d’altruisme, afin de favoriser la coopération, et dispensent même des « cours de nous », où l’on se concentre sur le bien-être de chaque élève à travers des jeux de rôles. L’enfant qui fait preuve d’empathie améliore son estime de soi et ainsi sa réussite scolaire. Il a par exemple été démontré que les élèves volontaires pour aider les autres ont de meilleurs résultats scolaires deux ans plus tard.

Enfin, les journées des élèves finlandais durent seulement de 4 à 6 heures, et ils n’ont que 10 à 20 minutes de devoirs par jour. Mais signalons aussi que les métiers de l’enseignement sont très valorisés dans les pays scandinaves, et que la formation dure cinq années pleines après le concours.

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