Prof et réunion : petit florilège

réunion

Le travail d’équipe a le vent en poupe, tant dans les entreprises privées que dans notre noble institution. Actuellement, il est fortement recommandé de faire travailler les élèves en groupe le plus possible, afin qu’ils apprennent à mutualiser leurs compétences et connaissances. En toute logique, il est demandé aux professeurs d’en faire autant. On peut trouver cela pertinent ou non, là n’est pas notre affaire. Mais le fait est que, qui dit travail d’équipe, dit réunion. Et on en a de plus en plus.

En principe, une réunion comprend un ordre du jour, c’est-à-dire les différents points qui vont être abordés. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il n’est pas rare qu’on soit convié ou convoqué à une réunion sans qu’on sache très exactement de quoi il retourne. Derrière un intitulé tel que « L’évaluation du nouveau DNB ou baccalauréat » peut se cacher une absence totale de ligne directrice.

Avouons-le, si les réunions partent souvent dans tous les sens, c’est la faute des profs et de leur immense capacité à digresser. Tous réunis au chaud à l’heure du thé, ils ont une fâcheuse tendance à se croire entre amis autour d’une bière : et ça refait le monde, et ça râle sur tout ce qui ne va pas, et ça pinaille sur des détails sans importance, et ça conteste le bien-fondé de la réforme ou du sujet de la réunion… Le prof est un animal qui parle, qui aime parler – voire s’écouter – et le fait d’avoir un auditoire adulte lui est si inhabituel qu’il en profite de manière éhontée. Tous experts en argumentation, nous pouvons passer un temps fou sur des sujets qui n’ont strictement aucun rapport avec l’objet de ladite réunion. Et le pire, c’est qu’ensuite on râle parce que cette dernière n’a pas été constructive !

C’est sans doute ce qui explique le fait que le nombre de réunions aille en croissant de manière exponentielle. Il arrive régulièrement qu’une réunion se termine par… la date d’une autre réunion, la première n’ayant pas suffi. Il est encore plus fréquent qu’aucune décision ne soit prise, faute de consensus. Si certains tentent, vaille que vaille, de recentrer le débat, ils doivent s’y reprendre à maintes reprises et avec un succès hélas limité. Mais, fort heureusement, on finit toujours par arriver à se mettre d’accord sur les objectifs à atteindre et la marche à suivre pour ce faire (et ceux qui ne sont toujours par d’accord, de guerre lasse, se taisent alors).

Voici la liste (non exhaustive) des réunions possibles :

  • Réunion du conseil d’administration
  • Réunion de pré-rentrée (aussi appelée « grand-messe »)
  • Réunion pédagogique, dans chaque discipline: elle a lieu au moins deux fois par an, avec le chef d’établissement et tous les enseignants d’une discipline. On y présente ses projets pédagogiques, on y indique s’il faut renouveler les manuels ou acheter un nouveau rétroprojecteur, on y parle DHG (Dotation horaire générale) pour la répartition de services (voir le chapitre concerné), on y est incité à songer à tel projet pédagogique, etc.
  • Réunion pédagogique avec l’ensemble des enseignants. Ces réunions ont lieu, le plus souvent, sur des temps de rattrapage de congés. Ainsi, pour rattraper le lundi de Pentecôte, chômé par les élèves comme par les profs, nous sommes conviés à deux réunions en soirée (17h- 20h, soit 6 heures en tout). Il s’agit là de parler du projet d’établissement et de régler les problèmes en cours, comme par exemple l’application de la nouvelle réforme ou encore la montée de l’indiscipline constatée (le cas échéant). Il y a toujours des tas de soucis à régler dans un établissement, ces réunions-là sont l’occasion de le faire de manière collégiale. On en compte trois ou quatre par an, sans compter la pré-rentrée ni les réunions de fin d’année (une semaine de réunions sans discontinuer).
  • Réunion des profs de tel ou tel niveau: là il s’agit d’aborder quelque chose d’assez précis, comme le devoir commun de 4e, la mise en place d’un dispositif d’accompagnement en 6e (comme Dcol), les modalités d’évaluation de l’oral du DNB (profs de 3e), l’organisation du parcours Avenir en 5e, les TPE en Première, le maintien des élèves en cours en juin en Terminale, les conseils de cycle (en particulier, la liaison CM2-6e), que sais-je encore… Selon les établissements, il y en a plus ou moins, mais on peut dire sans exagérer qu’on en compte trois à quatre par an minimum.
  • Réunion autour d’un projet pédagogique spécifique: ce sont, de loin, les plus nombreuses. On se réunit entre profs concernés pour, par exemple, le voyage en Angleterre, le projet de section européenne, l’EPI maquette de château, la mise en place d’une charte du « mieux vivre ensemble », etc. Ces réunions peuvent se passer de manière informelle, à midi chez un collègue par exemple. Elles sont à l’initiative des enseignants et non de la direction.
  • Réunion avec l’IPR (Inspecteur pédagogique régional). Rares, ces réunions ont des vocations diverses, comme l’harmonisation des critères de correction du bac ou encore la nécessité d’individualiser le parcours de chaque élève. Tout le monde n’y est pas convié, chacun ayant des attributions spécifiques et un profil plus ou moins concordant avec l’objet de la réunion. L’IPR vient expliquer la marche à suivre, cela ressemble donc davantage à une formation mais le dialogue reste ouvert : c’est donc bien une réunion.
  • Réunion des profs principaux de tel ou tel niveau : il s’agit d’harmoniser les pratiques, pour que tout le monde fasse la même chose. En 6e par exemple, une telle réunion pourra avoir comme objet les actions à mener pour que les PPRE (Programme Personnalisé de Réussite Educative, rédigé par les enseignants de primaire dans ce cas) soient suivis d’effets concrets. En 3e, ce sera autour du DNB et de l’orientation que tourneront ces réunions. Certains niveaux sont épargnés, comme les 5e, 4e et Première. Ce qui ne veut pas dire qu’ils ne sont jamais concernés, mais le sont moins que les autres.
  • Réunion d’une commission, comme le CEC (Conseil école-collège, qui ne concerne que les profs de 6e) ou la commission Education à la santé et à la citoyenneté (à laquelle se joindront l’infirmière et la CPE), ou encore une commission éducative pour un élève problématique, voire un conseil de discipline (si tu fais partie du CA ou que tu es prof principal de l’élève).

 

  • Les réunions de fin d’année. Quand les élèves désertent l’établissement et que tes cours deviennent moins remplis qu’une barrique de bière lors d’une fête munichoise, pointe le moment des réunions de fin d’année. Celles-ci s’étalent en moyenne sur une semaine, quand seuls quelques élèves errent encore dans la cour de récréation. On est en général fin juin, début juillet en collège, et un peu plus tôt en lycée.Pendant plusieurs jours, tu vas n’avoir que des réunions, de toutes sortes, pour préparer l’année prochaine. Il va être question de calendrier, de matériel pédagogique, de répartition ultime de services, d’emploi du temps, de projets à mettre en place, de constitution de classes, de nouveau règlement intérieur ou de nouveau carnet de correspondance, de réajustements divers et variés, d’évaluation, de parcours individualisés, de processus d’accompagnement individualisé, d’harmonisation de progressions, etc. Les possibilités sont quasi infinies et dépendent entièrement de ton chef d’établissement, de l’activisme de tes collègues, des difficultés rencontrées pendant l’année au sein du bahut, de l’éventuelle réforme en cours, des instructions du ministère, de la météo… Bref, il n’y a pas de règle. J’ai connu des établissements où cette session de réunions ne durait qu’une journée, et d’autres où elles s’étalaient sur dix jours. Chaque époque a ses modes, ses us et coutumes, de même que chaque établissement. Dans tous les cas, tout le monde est en général assez détendu (les vacances approchent vraiment), il fait beau le plus souvent, et l’ensemble n’est pas désagréable.

     

    Dernière chose : en REP (Réseau d’Education Prioritaire) et en REP +, tu auras beaucoup plus de réunions que dans les établissements non ainsi classifiés. C’est en partie pour cela que les enseignants de REP et REP+ touchent une indemnité supplémentaire. Les élèves dits « difficiles » demandent plus de concertation, plus d’actions ciblées, plus de projets pédagogiques, plus d’harmonisation, et cela entraîne plus de réunions. Quand on enseigne dans ces zones défavorisées, il ne faut donc pas s’attendre à rentrer chez soi dès 17 h tous les jours. Les réunions ont lieu après les cours, et sur la pause méridienne. On gagne plus, mais on travaille indéniablement plus, et pas seulement en termes nerveux.

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