Les élèves, en général

élèves

Ah ! Nos élèves ! Ces chères petites têtes blondes, brunes, rousses, qui nous promettent tant de joies ! Là est l’essence même de notre profession, très largement au-delà de l’amour que l’on peut éprouver pour la discipline que l’on va enseigner. Car prof, c’est un métier humain avant tout, et finalement plus proche d’infirmière, psychologue, flic, maton ou nounou que d’une profession intellectuelle (dans le secondaire en tous cas).

Car ne t’y trompe pas, cher aspirant enseignant : ta « matière » sera vite secondaire par rapport au reste. Bien sûr il te faudra déployer des trésors d’ingéniosité et de savoir -pédagogique et didactique – pour faire entrer dans ces charmantes petites têtes ce que tu as appris (ou plutôt ce que les programmes t’ordonnent de leur apprendre) ; bien sûr tu feras de ton mieux pour leur insuffler le même enthousiasme envers Pythagore, Rousseau, Hugo ou les circuits électriques qui ont fait ta délectation ; bien sûr tu peaufineras inlassablement tes cours pour qu’ils soient les plus percutants, intéressants et digestes que possible. Mais au final, après quelques années, tu t’apercevras que ce qui fait l’essentiel de tes journées, c’est ton rapport aux gamins, et non le contenu de ton enseignement.

Si tu souhaites faire ce métier parce que tu penses que tu vas éclairer d’une bienheureuse lanterne les esprits confus de plusieurs générations, mais que les enfants de tes amis – ou tes neveux, voire tes propres enfants – t’agacent au plus haut point, un bon conseil : change d’orientation.


Cela peut paraître idiot de le préciser, mais on en a vus s’effondrer pour moins que ça, alors disons-le : pour être prof, il faut aimer les enfants et les ados (enfin, surtout les ados dans ton cas). Car un ado n’est jamais qu’un grand enfant, qui se prend pour le roi du monde mais qui dort avec un doudou (le portable pouvant assumer cette fonction chez les plus âgés). Avec l’arrivée des hormones, l’enfant découvre un univers qui lui était auparavant insupportable : l’autre sexe (ou le même, selon ses affinités, mais dans tous les cas, la notion de « sexe » devient prévalente). Il en découle le plus souvent un désintérêt assez patent envers toute autre chose, à l’exception notable de :

  • Son corps (mais finalement c’est assez lié)
  • Sa prochaine sortie en boîte ou en teuf (mais finalement c’est assez lié)
  • Son sacro-saint smartphone (mais finalement c’est assez lié)
  • Sa réputation (mais finalement c’est assez lié)

Au collège

Le pré-adolescent (jusqu’en fin de 5e) est un être hybride. Il a l’apparence d’un chérubin, avec de mignonnes fossettes, un cartable trop lourd – et encore bien plein -, des airs innocents. Dans les faits, il est d’ailleurs relativement innocent : il ne comprend que (très) mal le second degré, est sincèrement affecté par une mauvaise note ou une réprimande, et est même capable de penser qu’il pourra devenir médecin malgré une moyenne déplorable depuis le CE1.


Mais derrière cet habit angélique se cache un loup sanguinaire, si tu n’y prends garde. Le pré-adolescent n’est en effet pas encore trop submergé d’hormones, et n’a donc rien d’apathique. Au contraire, il est vif ! Si sa fraîcheur est intensément agréable comparée aux neurasthéniques des niveaux supérieurs, elle est toutefois dangereuse, car difficilement canalisable.

Au lycée

Les élèves de lycée sont grands, ce qui peut tendre à les confondre avec des êtres doués de la même raison qu’un adulte. Grossière erreur ! Leurs silhouettes et leurs francs-parler sont des paravents qui ne servent qu’à cacher une vérité qu’ils exècrent : ils sont encore des petits. Bien qu’ils sachent se moucher seuls et possèdent des moyens de paiement, leur âge affectif et intellectuel est en total décalage avec leurs manières émancipées.

Donc il ne faut pas s’y tromper : les élèves de lycée sont avant tout de grands enfants, qui ne pensent qu’à s’amuser et à explorer leur vie sexuelle. Bien que conscients, le plus souvent, des enjeux de leur avenir, ils ne parviennent pas complètement à envisager qu’il leur faudra un jour assumer des responsabilités professionnelles. Obsédés par le nombre de like sur leur compte Instagram et par la possibilité de dormir jusqu’à midi, ils préfèrent de très loin leurs soirées entre amis à tes doctes considérations. Ne prend donc pas de manière personnelle leur indifférence envers les cours époustouflants que tu leur prodigues. S’ils sont devant toi, ce n’est pas par envie mais par obligation.

Ceci étant dit, les élèves sont, contre vents et marées, ce qui nous tient à ce métier. Attachants, amusants, performants, intrigants, en détresse, en demande, en attente, en progrès, provocateurs, dociles, amoureux, et déstabilisants, ils sont une formidable chance d’être au coeur de l’humain, dans une dimension rare : celle de l’innocence et du devenir.

Tu verras que, au bout de dix à quinze ans de carrière, tu t’essouffleras. Mais ce qui te donnera la force, le courage et l’envie de continuer, ce seront les élèves. Ceux que tu as eus, ce qui seront dans tes classes, et ceux que tu auras à découvrir.

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