Les projets pédagogiques

projets pédagogiques

Voici le nouveau Graal de l’Education Nationale : les projets pédagogiques. Inspiré des travaux de Freinet, ils ont le mérite de rendre les élèves actifs. Lointain est le temps où il suffisait de retenir ses leçons et d’avoir quelque bagage rhétorique pour réussir. Désormais, l’élève doit être dans une dynamique de « projet » aussi souvent que possible.

Sur le papier, c’est réellement formidable. En gros, plutôt que d’écouter un cours magistral déconnecté de toute réalité, l’élève va devoir mettre en œuvre des compétences – l’autre grand dada à la mode – particulières pour accéder au savoir, d’une manière concrète qu’il pourra rattacher à ses représentations, ce qui l’amènera naturellement à les faire évoluer. En clair, cela signifie que, plutôt que de lui donner dix exercices sur l’accord du participe passé, tu vas le faire correspondre avec un condisciple éloigné (une région exotique est recommandée pour susciter son intérêt) et l’inciter à pratiquer une orthographe irréprochable pour se faire bien voir de ce lointain alter-ego. Le postulat est que l’élève souhaitera de lui-même maîtriser au mieux le code orthographique pour réussir cette tâche concrète. C’est un exemple parmi des centaines – voire des milliers -d’autres, qui n’a aucune valeur académique. Mais, toi qui a été ado, est-ce que vraiment tu te souciais de la manière dont serait reçue ton épître dans de pareilles circonstances ? Non. Et l’ado actuel s’en fiche complètement aussi.

C’est pourquoi tous les projets pédagogiques ne sont pas bons. Prenons un autre exemple. On monte un projet autour des grands hommes du XIXe siècle, dont le point d’orgue est une journée à Paris, à visiter des musées, l’assemblée nationale, etc. On se dit que, pour comprendre cet environnement si inhabituel pour de petits provinciaux, la mise en œuvre des connaissances et compétences apprises en amont va s’avérer obligatoire. Que nenni ! La seule chose qui intéresse nos 80 élèves en goguette, c’est le trajet en train et le souvenir (acheté fièrement dans une boutique dédiée) qu’il pourront ramener dans leur pénates : tour Eiffel miniature de préférence. Durant la sortie, toutes les connaissances patiemment transmises durant des semaines volent en éclat, au profit d’un émerveillement – bien légitime – devant le métro, des SDF ou encore les « super bagnoles » qui circulent.

Mais il y a aussi de bons projets pédagogiques. Ainsi, concevoir et réaliser un petit robot en technologie peut vraiment mobiliser une classe et l’amener à se dépasser, à consacrer de longues heures à des recherches pointues sans voir le temps passer, etc. Ou bien, un défi en langue vivante, qui permet aux meilleurs d’obtenir des récompenses bien tangibles (pas des dictionnaires, plutôt des kits de papèterie) est souvent une réussite (exemple : le big challenge, http://www.thebigchallenge.com/fr/).

En fait, pour savoir si le projet pédagogique est bon ou pas, il faut d’abord déterminer s’il va plaire aux élèves ou non, et pour les bonnes raisons ou non. Ainsi, si tu demandes à une classe si elle est motivée pour faire un voyage à Paris, elle va immanquablement hurler de joie (pour peu qu’elle ne soit pas localisée à Montreuil). Mais si tu demandes à cette même classe si elle a envie de se coltiner des exposés sur Mirabeau, Rodin et Pierre Curie, la réponse sera très nettement moins enthousiaste. Il te faut donc déterminer si les connaissances et compétences que tu souhaites faire acquérir (ainsi que celles des collègues participant) trouveront une réelle « plus-value » dans ce projet. Si tel n’est pas le cas, c’est qu’il n’est pas nécessaire de chercher midi à quatorze heures, et qu’il conviendrait de réviser ta copie.

Avec la réforme du collège de 2016, il n’est plus besoin de se demander si on se sent l’envie de participer ou non à un projet pédagogique. On y est obligé.

En effet, avec la naissance des EPI (Enseignements Pratiques Interdisciplinaires) et des Parcours (citoyen, culturel, avenir et santé), chaque prof participe a minima à un (souvent plus) projet pédagogique dans l’année. Pour en savoir plus sur ces deux derniers aspects des projets pédagogiques, voir les articles associés.

Que ce soit pour les parcours, les EPI ou les projets n’ayant aucun label particulier, il va de soi que ces derniers se doivent de s’inscrire en liaison étroite et intelligente avec les programmes et les compétences du socle. En clair, il ne s’agit pas de faire une sortie ou de créer une exposition avec nos élèves juste parce qu’on trouve cela intéressant, mais bien de faire coïncider nos programmes, les compétences du référentiel et nos idées de projet. Une équation qu’il n’est pas toujours aisé de résoudre, dans la mesure où un projet pédagogique est, de par sa nature, chronophage. On y passe toujours plus de temps que prévu, aussi bien en classe qu’en amont et en aval. Un peu comme les travaux pour une maison, qui coûtent toujours plus cher et durent plus longtemps que prévu !

En début d’année, on est souvent très enthousiaste pour participer à plein de projets très prometteurs. Et le fait est que ces derniers ont l’avantage de motiver (le plus souvent) les élèves. Mais il faut savoir ne point trop charger la barque, sans quoi on finit par se noyer (dans le boulot). Si l’on participe à 4 ou 5 projets, c’est déjà très bien ! Bien évidemment, la charge de travail n’est pas la même si on est à l’initiative du projet, son coordonnateur, ou si l’on se contente de faire quelques séances en lien. Néanmoins, quel que soit le degré de participation, il est clair qu’il te faudra faire avec :

  • des heures de concertation (des réunions sur ce projet)
  • des heures de préparation (pour faire coïncider ton programme avec ledit projet et pour élaborer les séances)
  • des heures d’évaluation
  • des heures de présentation éventuellement (créations telles qu’expositions, spectacles, vidéos, etc)

Il ne s’agit pas ici de te démotiver, bien au contraire ! Mais par expérience je peux te dire que les projets sont très coûteux en temps et en énergie. Le plus sage est donc de commencer avec un ou deux projets dans l’année, et de voir si l’on peut se permettre davantage par la suite. Il faut aussi le temps de se rôder ! Je ne te cache pas, par ailleurs, que les chefs (inspecteurs et chefs d’établissements) valorisent beaucoup plus facilement un prof qui participe à plusieurs projets. C’est assez mal vu, de nos jours, de ne s’en tenir qu’à ses cours stricto sensu. Le travail d’équipe que nécessite la réussite d’un projet pédagogique, et la motivation accrue des élèves, sont deux facteurs très largement pris en compte lors de ton évaluation (voir rubrique rendez-vous de carrière).

Sur Expérithèque, tu trouveras plus de 5000 projets innovants et expérimentations, classés par académie, qui te donneront moult idées sur les projets que tu peux mener avec tes élèves.

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